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Prêtres et laïcs aux avant-postes

Une perversion de l’Église : voici comment le pape François qualifie ce mal qu’il combat, ce cléricalisme qui affecte le fonctionnement de la curie romaine. Mgr Michel Aupetit revient sur ce défi majeur et l’articule avec le sujet de la paternité, au cœur de la vocation des prêtres. Comment alors ne pas alors confondre paternité et cléricalisme ? L’ancien archevêque de Paris nous invite à une nouvelle harmonie dans les rapports entre clercs et laïcs, hors de toute caricature.

 

Comment définir le cléricalisme ? Est-il le mal de notre siècle ou une tendance qui a toujours existé ?

Le cléricalisme consiste à s’ap­proprier la mission reçue de l’Église et à s’identifier à sa fonction. Le risque alors est de ne plus se situer dans une attitude de service, celle qui convient à un disciple du Christ. Il a toujours existé, mais désigné sous d’autres vocables.

 

Quel lien établissez-vous entre le cléricalisme et la paternité ?

Le prêtre est appelé « père » ou « M. l’abbé », ce qui revient au même. Cela fait référence à la paternité de Dieu. Dans ce livre, je montre comment la notion même de paternité humaine et divine est apparue dans nos sociétés. La paternité est tou­jours synonyme de l’autorité. Or, le danger est que cette auto­rité se transforme en pouvoir. En ce qui concerne le prêtre, il ne s’agit pas d’être père d’en­fants de 4 ans à qui il faudrait tout apprendre, d’adolescents à la recherche de leur identité, mais bien d’enfants adultes qu’il conviendra d’accompagner, d’écouter et d’encourager.

 

Dans nos sociétés occidentales, la figure du prêtre n’est plus valorisée et est devenue marginale. À quoi la sacralité du sacerdoce tient-elle ?

Il y a bien un caractère sacré conféré par l’ordination. Cela entraîne un respect relatif à l’ap­pel de Dieu auquel a répondu le prêtre par le don de sa vie pour être sacramentellement confi­guré au Christ. Le sacerdoce ministériel figure ainsi ce que tout baptisé est appelé à vivre : l’union à son Seigneur.

 

Comment les prêtres peuvent-ils, dès lors, trouver leur place sans pour autant prendre toute la place, en cédant à un besoin humain de reconnaissance ?

La question est plutôt de savoir : de qui attend-on la reconnaissance ? D es hommes ou de Dieu ? Seule la prière quotidienne et profonde de celui qui cultive l’intimité avec le Christ permet de dépasser le besoin d’exister dans le regard des autres et dans la société. Nous avons suivi Jésus, le Fils de Dieu, qui a pris l’humble condition humaine jusqu’à mourir comme un esclave. Plus nous serons configurés au Christ serviteur, plus nous trou­verons notre juste place.

 

Comment les prêtres peuvent-ils se rendre proches du peuple de Dieu sur internet en devenant des « influenceurs » de Dieu sans imposer une nouvelle forme de cléricalisme ?

Pour cela, il ne s’agit pas d’être des « influenceurs », mais des missionnaires avant tout. Le risque, quand on dit influencer, c’est de se fixer sur le chiffre, de compter le nombre de « likes » et de clics sur les réseaux sociaux. La paternité du prêtre s’adresse au cœur des fidèles et s’ac­complit essentiellement dans la relation interpersonnelle. L’ivresse du nombre est une illusion qui peut nous donner une fausse importance, celle de qui veut prendre la place de celui que nous sommes chargés d’annoncer : notre Seigneur Jésus Christ.

 

Pour retrouver le juste sens de la paternité, pensez- vous que la présence des femmes devrait s’affirmer encore plus au sein des instances de décision et de gouvernement dans l’Église ?

Quand j’ai parlé avec le pape François du fait que j’avais introduit une femme dans le conseil du séminaire et une autre dans le conseil des nomi­nations du diocèse de Paris, le Saint-Père m’a répondu que nous ne pouvions pas gouverner sans les femmes. Il ne s’agit pas simplement de les introduire dans un système hiérarchique, mais de leur donner une place plus importante encore, celle du vis-à-vis, comme Marie qui dit à son Fils, « ils n’ont plus de vin », déclenchant ainsi le premier miracle de Jésus ; comme Marie Madeleine qui annonce la résurrection, et est ainsi devenue Apôtre des apôtres en permettant à ceux-ci d’accueillir la résurrection et d’accomplir leur ministère. Elles ont un regard différent et indispensable. Le vis-à-vis réfère de façon particulière au Créateur et Seigneur qui les créa « homme et femme », et permet au prêtre de retrouver sa juste place sacerdotale.

 

Peut-on espérer que le synode sur la synodalité permette de repenser la fraternité entre les membres de l’Église ?

L’espérance est une vertu divine qu’il est tout à fait important d’accueillir après ce synode. La fraternité viendra d’une mis­sion portée ensemble, entre les prêtres, les consacrés, les fidèles baptisés. Oui, prêtres, prophètes et rois, ensemble, nous sommes au service du Ressuscité qui donne la Vie à tout homme. ¦

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